Clément Nkurunziza est innocent!: Le contexte historique des groupements « Aba Jeunes »

Le Détenu n° RMP 724/NTH,Clément Nkurunziza, est toujours incarcéré à la Prison de Ngozi. Il a été arrêté le 22 mars 2018 à l'aéroport de Bujumbura à la descente d’un avion qui le ramenait manu militari des Etats-Unis d'Amérique. Motif de son arrestation et de son incarcération ? « Assassinat d'étudiants Hutu au Campus Mutanga de l’Université du Burundi dans la nuit du 11 au 12 Juin 1995.» Accusation gravissime!

Par
Athanase KARAYENGA
on
19.9.2020
Categorie:
Justice
Chronique d'Athanase Karayenga

Après une détention «provisoire » qui a duré deux ans, Clément Nkurunziza a enfin comparu devant la justice le mercredi 22 Janvier 2020. Une délégation impressionnante a effectué le voyage de Bujumbura à Ngozi afin d’écouter sa déposition. A cet effet, le  Tribunal de Grande Instance de Mukaza avait dépêché cinq juges, une greffière et un Officier du Ministère Public.

Deux Commissaires, M. DéoHakizimana et Me Déo Ndikumana, dépêchés par la Commission Vérité Réconciliation (CVR) ont également assisté au procès. Ils ont d’ailleurs refusé que le cas de Clément Nkurunziza soit considéré comme relevant de la Justice Transitionnelle prévue dans le cadre de l’Accord de Paix et de Réconciliation d’Arusha signé le28 Août 2000. Du coup, Clément Nkurunziza et ses avocats ont refusé de plaider.Ce qui n’a pas empêché la Justice burundaise de transmettre à Clément Nkurunziza la signification du jugement par défaut. La condamnation lui a été signifiée le 28 Juillet 2020. Soit six mois après l'audience publique du 22 janvier 2020. Le temps de la Justice burundaise se compte souvent en années-lumière.

Le contexte historique des groupements « Aba Jeunes »

Tout est parti d’un climat de vive tension opposant des jeunes natifs de Ngagara regroupés, d’une part, ausein de l’Association « Génération Démocratique du Burundi » (GEDEBU),évoluant dans la mouvance du parti Sahwanya FRODEBU et, d’autre part, des jeunes membres du groupe  « Sans Échec &Sans Défaite ».

En fait, on parle d’affrontements entre jeunes du GEDEBU et des « Sans échecs », alors qu’il serait plus juste de parler de divers groupes de Jeunes inter-quartiers.  En 1995, quelques membres de ces groupes incarcérés à Mpimba à la suite des rixes entre ces Jeunes de quartiers, ont d’ailleurs avoué et assumé certains crimes de sang commis, souvent, sous les ordres de commanditaires qui les finançaient et leur fournissaient les motivations idéologiques et communautaires. Certaines sources indiquent que les Forces Armées et la Gendarmerie se seraient impliquées tardivement dans ces conflits entre Jeunes de quartiers. Mais davantage en termes de tentative de récupération de l’un ou de l’autre mouvement. On reviendra plus tard sur l’implication supposée des Forces de l’Ordre dans ces affrontements entre Jeunes des quartiers en 1995.

Clément Nkurunziza était « Correctionnal Officer at Texas Department of Criminal Justice”- USA

Les organigrammes de ces divers groupes de Jeunes n’ont d’ailleurs jamais été connus. Cependant, les noms de certains anciens membres de ces groupes, présumés coupables de crimes commis à cette époque, seraient connus actuellement. Car, dans le secret des confidences encercles très restreints, ils avoueraient aujourd’hui leur culpabilité dans ces meurtres commis il y a 25 ans.

Evidemment, motus et bouche cousue ! Rien vu ! Rien dit ! Le public burundais serait très surpris, semble-t-il, de découvrir les noms de ces présumés coupables qui pourraient figurer sur une liste de repentis mais que la Justice burundaise n’a jamais essayé d’identifier et encore moins de juger et de condamner.

En 1993, le GEDEBU était le groupe de Jeunes des quartiers le plus connu en raison de son encadrement clandestin par le Front Démocratique du Burundi (FRODEBU). En effet, les dirigeants de ce groupe auraient été des officiels du FRODEBU et la première manifestation publique du GEDEBU aurait été une marche de ses membres couverts de branchages de camouflage sur la tête et parcourant le quartier Ngagara. Cette démonstration de force aurait été organisée le 2 Juin 1993, le  lendemain de l'élection présidentielle au cours de laquelle Melchior Ndadaye venait d’être élu Président de la République. Cependant, ce sont des Jeunes de Kamenge qui auraient organisé et participé à cette marche transformée en démonstration de force à travers Ngagara.Ces groupes de Jeunes  étaient dénommés « Bataillons des Quartiers ». Ils étaient très actifs aussi dans les quartiers de Bwiza et de Cibitoke. En outre, il semble qu’il existait aussi des « Bataillons » similaires à l’intérieur du pays.

Par ailleurs, il semble également que les appellations « Sans Echec & Sans Défaite » ne correspondaient pas tout à fait à la réalité. C’est du reste le FRODEBU qui en aurait paradoxalement assuré la promotion dans ses discours de propagande militante. Les membres supposés de ces groupes de Jeunes s’appelaient eux-mêmes  « Aba Jeunes », « Les Jeunes ». Tout simplement ! Il semble, du reste, qu’il existait d’autres appellations de groupes de Jeunes et qui n’étaient ni « Sans Échec & Sans Défaite. »

En juin 1995, toutes les personnes impliquées dans les rixes de quartiers étaient, faut-il le rappeler,très jeunes. A titre d’exemple, il se pourrait que même Alain Nyamitwe soit devenu membre du GEDEBU juste parce qu’il était natif de Ngagara. Les premiers chefs du GEDEBU auraient d’ailleurs évolué, auparavant, comme pionniers au sein de la Jeunesse Révolutionnaire Rwagasore (JRR). Exactement sur le modèle de Léonard Nyangoma et Sylvestre Ntibantunganya, qui ont travaillé au sein de la Permanence Nationale du Parti UPRONA. Le premier au sein du Syndicat unique  et le second au sein de l’Institut Louis Rwagasore. Ces ténors du FRODEBU, lors de la victoire de Melchior Ndadaye,avaient œuvré auparavant, eux aussi, au sein du parti UPRONA qu’ils avaient probablement mission de pénétrer et de torpiller de l’intérieur. Au Burundi, la transhumance politique n’était pas l’apanage des seuls Jeunes de quartiers pendant cette période trouble de la guerre civile de 1993 à 2004. Ce sont, en partie, les surprises et les petites trahisons que permettait le parti unique !

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