Déjà connu pour sa médiocrité politique, Ndayishimiye démontre qu'il est un piètre stratège

Non seulement il y a eu des erreurs stratégiques, mais des échecs en matière de renseignement ont entaché ce déploiement malheureux. Ndayishimiye et son armée semblent avoir été pris au dépourvu par la supériorité technique et tactique de leur voisin du nord. Les coups de gueule qui ont suivi montrent à quel point il est inquiet de voir son armée et lui-même découvrir leurs lacunes.Cet échec du renseignement ne surprend personne, hormis Ndayishimiye. Logé dans le bureau du président, loin de tout contrôle, le SNR est devenu un outil de répression.

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on
18.2.2025
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Politique

Depuis le Kivu, tant au nord qu'au sud, où elle avait été dépêchée dans le cadre d'une mission controversée visant à défendre des intérêts inavoués du président burundais, Évariste Ndayishimiye, la dizaine de milliers de militaires burundais, représentant environ dix bataillons, se voit contrainte de battre en retraite après la prise de Bukavu par des forces adverses.

Cette situation désastreuse illustre non seulement l'état de l'armée burundaise, mais aussi la complexité des enjeux géopolitiques dans la région des Grands Lacs africains, une zone marquée par des conflits historiques, des rivalités ethniques, et des luttes pour le pouvoir qui ont souvent des ramifications au-delà des frontières nationales.

Un bon nombre de soldats burundais ont été fauchés lors des combats, tandis que d'autres, dans un acte de désespoir ou de pragmatisme, se sont rendus à l'ennemi. D'autres encore, pris de peur, se sont terrés dans les bois, cherchant à éviter le contact avec les forces adverses. Les plus chanceux, quant à eux, rentrent chez eux la queue basse, portant avec eux le poids de l'humiliation et de la défaite. Cette déroute est sans équivoque, mais elle soulève des interrogations sur la responsabilité de cette situation. Certains analystes et observateurs mettent en cause le président Évariste Ndayishimiye lui-même, le tenant pour responsable de cet échec, et non l'armée, qui, il faut le dire, a fait preuve de professionnalisme dans d'autres contextes, ce qui rend encore plus perplexe la tournure des événements actuels.

En effet, l'armée burundaise a un passé de succès, comme en témoigne son intervention légendaire en terre somalienne, où elle avait été déployée dès 2007 pour traquer les rebelles Al Shebabs. Dans ce cadre, l'armée burundaise était techniquement outillée et bénéficiait d'un soutien clair et solide de la part des organisations internationales telles que l'Union Africaine (UA) et les Nations Unies (ONU). La mission était limpide, et les soldats étaient motivés par un objectif commun, celui de restaurer la paix et la sécurité dans une région dévastée par le terrorisme. En revanche, la déroute actuelle de l'armée burundaise en République Démocratique du Congo (RDC) contraste fortement avec ces succès passés, où elle faisait face à un ennemi plus redoutable, mieux équipé et engagé dans une cause plus profonde, à savoir l'extrémisme islamique, qui posait un défi majeur à la stabilité régionale.

Dans le cadre de son engagement en RDC, Évariste Ndayishimiye s'est rendu discrètement sur le terrain, alignant des Imbonerakure, ainsi que d'autres soldats fraîchement recrutés, souvent mal préparés et peu motivés par la cause en jeu. Ce choix stratégique a été particulièrement problématique, car il a conduit à une absence de cohésion et de stratégie sur le terrain. Pire encore, alors que les militaires burundais avaient précédemment comme alliés d'autres soldats professionnels et techniquement équipés, leurs alliés en RDC se sont révélés être des FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo) manquant de motivation, ainsi que des milices FDLR, animées par une haine atavique envers les Tutsis et ceux qui leur ressemblent. Ces facteurs combinés ont créé un environnement de combat désavantageux pour les troupes burundaises, rendant leur échec presque inévitable.

L'échec de cette mission était donc prévisible, et il est devenu évident que le président burundais, désormais perçu comme le grand perdant de la double prise de Goma et Bukavu par le M23, tente de détourner l'attention en évoquant une menace du Rwanda pour toute la région, une stratégie qui pourrait ne pas suffire à masquer ses vulnérabilités et en somme sa position à la tête du pays et de son parti politique. L’humiliation est douloureusement vécue non seulement par une armée vaincue, mais aussi par les généraux et l’élite de son parti politique qui ont suivi aveuglément un président en quête de sauver son emprise défaillante sur le pouvoir. Il cherchait désespérément à gagner quelques millions de dollars pour sauver l'économie défaillante du Burundi et par ricochet son pouvoir qui en dépendait.

Les lacunes dans la planification, la stratégie, et le déploiement incoordonné, associé à un manque d'une cause et une mission de combat claires, ont mis en lumière la médiocrité du commandant en chef des forces armées. Non seulement il a cimenté son image de politicien médiocre, mais il apparaît également comme un piètre tacticien et un stratège pitoyable. Ce constat est renforcé par sa tendance à interpréter la situation sous un prisme idéologique plus que politique, en présentant le conflit comme une opposition entre les Bantu et l'empire Hima.

Il a d'ailleurs récemment déclaré que si la communauté internationale ne prenait pas garde, la guerre pourrait s'étendre à l'ensemble de la région, une déclaration qui semble davantage motivée par un besoin de galvaniser le soutien national qu'une réelle évaluation des risques et de stratégies. Même pour les observateurs non initiés aux tactiques de guerre, il est évident qu’il s’agissait d’un engagement mal exécuté qui devait se terminer en désastre.

Tenez, au lieu de sécuriser la région de Bukavu frontalière à son pays, avant de marcher vers le nord en direction de Goma, il a choisi de laisser son flanc arrière exposé, laissant sa frontière avec la RDC non sécurisée. Quand il lui est venu à l’esprit que son armée devait se replier sur leur flanc arrière, il était trop tard, elle était en désarroi, fuyant un ennemi qu’il avait sous-estimé.

Un commandant bien formé aurait pu voir cet échec dès le début de leur engagement dans la guerre en RDC. Lorsqu’ils ont rejoint les FARDC sur le front, ils ont été abandonnés face à un ennemi déchaîné à plusieurs reprises par leurs collègues congolais. Une fois que cela s’est produit à plus d’une occasion, ils auraient dû se rendre compte qu’ils avaient des partenaires incompétents.

Non seulement il y a eu des erreurs stratégiques, mais des échecs en matière de renseignement ont entaché ce déploiement malheureux. Ndayishimiye et son armée semblent avoir été pris au dépourvu par la supériorité technique et tactique de leur voisin du nord. Les coups de gueule qui ont suivi montrent à quel point il est inquiet de voir son armée et lui-même découvrir leurs lacunes.

Cet échec du renseignement ne surprend personne, hormis Ndayishimiye. Logé dans le bureau du président, loin de tout contrôle, le service de renseignement burundais est devenu un outil de répression, voué à la survie du régime plus qu'à la sécurité nationale. Il a été accusé des pires violations des droits de l'homme, notamment la torture, le viol, l'enlèvement et les exécutions extrajudiciaires. La sécurité nationale a été reléguée au deuxième rang sur la liste des priorités du renseignement national, laissant les agents des services secrets pourchasser les ennemis et les ennemis présumés du régime et du président.

Ce dévouement à la survie du régime s'est traduit par une purge de tous les éléments jugés peu fiables, y compris les éléments tutsis. Aujourd'hui, les services de renseignement civil et militaire sont presque exclusivement composés d’éléments hutus dont la majorité est issue de la milice imbonerakure, plus formés à l’application d’une violence impitoyable contre des opposants présumés qu’à l’art de recueillir des renseignements tangibles et exploitables.

Cependant, la tournure des événements, qui semble lui être défavorable, l'oblige à revoir sa position et à nuancer ses propos sur le Rwanda. C'est dans cette optique qu'il a formulé un tweet récent, dans lequel il déclare : « Suite aux discussions que j'ai eues avec des pays alliés du Rwanda, ceux qui espéraient une attaque du Rwanda contre le Burundi doivent revoir leurs attentes. Toutefois, les Burundais doivent demeurer prêts, car personne ne sait quand l'attaque pourrait avoir lieu. » Ce changement de ton témoigne de la pression croissante sur son administration, mais ne met pas un terme aux nombreuses questions qui émergent suite à la chute de Bukavu, une situation qui a provoqué des secousses dont les répercussions sont encore loin d'être résolues. Les rumeurs de tensions croissantes entre le Burundi et le Rwanda ne cessent de circuler, alimentées par des discours nationalistes et des manœuvres militaires des deux côtés de la frontière.

La situation actuelle laisse le président Évariste Ndayishimiye face à un dilemme géopolitique d'une complexité remarquable, mettant en jeu non seulement sa survie politique, mais aussi sa survie personnelle. Il se trouve dans une position délicate : va-t-il choisir de se désengager de la RDC pour éviter de s'enliser dans un conflit qui pourrait se révéler catastrophique, ou va-t-il au contraire décider de s'engager davantage, risquant ainsi de transformer le Burundi en un véritable champ de bataille? Quelle que soit la décision qu'il prendra, il est évident que le risque n'a jamais été aussi élevé, et les conséquences de ses choix pourraient avoir des répercussions durables sur la stabilité de la région ainsi que sur son propre avenir politique. Les enjeux sont d'autant plus cruciaux que la communauté internationale observe avec une attention accrue, consciente que le moindre faux pas pourrait entraîner une escalade des violences et un nouveau cycle de conflits dans une région déjà instable.

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