Evariste Ndayishimiye, un faible dictateur qui peine à faire sa marque?

Si la doctrine en matière de gestion de la crise sanitaire a changé, l’habitude de la main forte répressive et du verbe menaçant ne semble pas prête à disparaître. Ce qui avait paru comme un début prometteur vire facilement en amateurisme et Evariste Ndayishimiye a commencé à ressembler davantage à un apprenti dictateur, plus cruel que son prédécesseur mais moins apte à contrôler les rivalités internes au sein du parti au pouvoir.

Par
Burundi Daily
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8.11.2020
Categorie:
Gouvernance

On ne peut pas évoquer l'inexpérience car il a occupé de postes importantes sous le régime de feu Pierre Nkurunziza. C'est juste une faiblesse que ceux qui l'ont côtoyé pendant les années de maquis reconnaissent facilement et que certains évoquent pour expliquer la dégradation des situations politique, humanitaire, économique et une gouvernance qui atteint un niveau de médiocrité exceptionnelle.

D'autres évoquent le cas d'un homme qui a été mis en place pour échouer afin que la clique de généraux tous puissants et plus extrémistes  puisse effectivement prendre le contrôle du pouvoir. Après la mort inopinée du guide suprême, un bon nombre de Burundais et les bailleurs traditionnels du Burundi espéraient voir un changement positif dans la gestion du pays, et un ralentissement de la dégradation des droits humains dans le pays.

Changement d’homme, changement de discours et rien d'autre

À peine arrivé au pouvoir, le général « Neva » amorce un tournant radical. La Covid-19 est déclaré « ennemi des Burundais » qui sont appelés à respecter scrupuleusement les gestes barrières. Le savon est subventionné et le prix du mètre cube d’eau baisse pour la durée de l’épidémie. Une campagne nationale de dépistage est lancée, les soins sont gratuits pour toute personne infectée. Plus encore, selon les mots mêmes du président, celui qui refuserait de se faire dépister et infecterait ainsi volontairement autrui serait considéré « comme un sorcier et traité aussi sévèrement que lui ».

Si la doctrine en matière de gestion de la crise sanitaire a changé, l’habitude de la main forte répressive et du verbe menaçant ne semble pas prête à disparaître. Ce qui avait paru comme un début prometteur vire facilement en amateurisme et Evariste Ndayishimiye a commencé à ressembler davantage à un apprenti dictateur, plus cruel que son prédécesseur mais moins apte à contrôler les rivalités internes au sein du parti au pouvoir.

Héritier d'une crise causée par son prédécesseur, Evariste Ndayishimiye semble impuissant face à une multitude de problèmes qui découlent de cette crise. Incapable d'imposer son autorité et sa volonté à tous les échelons de l'État et face à une invasion rebelle qui l'a paniqué, il est incapable d'arrêter les meurtres, les enlèvements et autres violations des droits de l'homme perpétrés par les forces de sécurité locales qui semblent être en dehors de son contrôle et commandement.

Entre avril 2015 et mai 2018, plus de 8 500 arrestations arbitraires, 1 710 meurtres, 486 disparitions forcées et 558 victimes de tortures ont été recensés. Général Neva, est sur le chemin de réaliser si ce n'est dépasser ces records catastrophiques de son prédécesseur.

Un faible dictateur sans vision ni contrôle du pouvoir

Depuis 2015, le pays est au ban de la communauté internationale. Et le tarissement de l’aide au développement a durement frappé l’économie burundaise. Une enquête de la Cour pénale internationale est en cours. Au sein du parti présidentiel, les tensions montent entre les tenants d’une ligne dure et ceux qui pensent qu’il est urgent d’envoyer des signaux en faveur d’un retour à la normalité institutionnelle, politique et diplomatique. Pis, l’armée, fortement polarisée, fait pression sur un pouvoir tétanisé par le spectre d'un nouveau coup de force.

Paradoxalement, le régime a, en s'isolant, en aliénant la quasi-totalité de ses amis traditionnels et en gouvernant avec une brutalité rarement vue ou égalée par un régime des temps modernes; rendu la tâche facile et moins risqué pour tout général avide de pouvoir d'opérer un coup d'État.

Le nouveau président est bien conscient de cette précarité et doit tout faire pour garder ces rivaux à l'oeil. Les nominations du Maréchal Bunyoni et du général Ndirakobuca (alias Ndakugarika) respectivement aux postes de premier ministre et ministre de l'Intérieur et de la Sécurité publique, considérés comme les numéros 2 et 3 du régime sont un signe de sa vulnérabilité et de son impuissance.

Le nouveau président a une tâche impossible devant lui: Tenter de maîtriser et complètement contrôler les leviers de pouvoir internes ausein de son parti tout en faisant face à la situation économique, sociale et institutionnelle désastreuse du pays; et maintenir l'armée sous contrôle pour éviter d'être renversé.

Cette situation intenable le fait passer pour un dictateur inepte qui est sous le contrôle d'une petite clique des généraux de ligne dure, un leader qui n'a ni vision ni cohérence pour affronter les grands problèmes auxquels le Burundi est actuellement confronté.

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