Et si la population congolaise était consciente de ses maux et de sa responsabilité ?
Pourquoi ne pas mettre en place une politique de stabilisation des communautés congolaises, toutes tendances confondues, afin de favoriser la cohabitation pacifique et une cohésion nationale inclusive dans le respect des valeurs culturelles des uns et des autres, tant qu'elles ne sont pas contraires aux règles morales et d'éthique définies par la déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen ?
Il suffit d'observer l'incapacité des différents leaders de la société civile congolaise à s'attaquer aux véritables maux qui gangrènent leur pays, pour constater que cette société civile est la véritable responsable de la misère, chaque jour plus poignante, dans laquelle croupit la majorité de la population congolaise.
Ceci passe par leur incapacité à susciter l'indignation des Congolais face aux pillages systématiques des immenses ressources du pays, au détournement des recettes publiques et au bradage des richesses nationales par des acteurs sociopolitiques et économiques congolais.
La seule et l'unique cause pour laquelle ils se mobilisent et parviennent, à tour de bras, à inciter à la révolte les Congolais de tous les horizons (opposition et majorité confondues, intellectuels et analphabètes, églises et tribus et même l'administration publique et l’appareil sécuritaire) est bizarrement et malheureusement un appel à la haine contre les Tutsis.
Tutsi, bouc émissaire et homme de paille de la politique congolaise moderne
L’allusion aux Tutsis dans n'importe quel dossier constitue pour eux le sempiternel levier, un sésame pour obtenir leur mobilisation et leur ardeur à pousser la population à réagir de manière irrationnelle et souvent violente contre des membres de la communauté ethnique tutsie.
Aujourd’hui, au sein de l’opinion dominante en RDC, le Tutsi est tellement déshumanisé qu’il incarne déjà une image d’un type foncièrement machiavélique, maléfique, menteur et hypocrite ; déterminé à voler les droits et les terres d’autres congolais ; comptable de tous les échecs. En somme, de l’incapacité des acteurs de la société civile congolaise à faire face aux nombreux maux qui rongent la société congolaise.
Force est de constater que les acteurs politiques ayant commis des crimes économiques aux conséquences négatives et extrêmement graves sur la vie des congolais, dont les crimes à l'origine de massacres et de déplacements massifs de populations, avec leur lot de viols et de violences contre les populations civiles se promènent librement, sans que la société civile puisse se mobiliser pour exiger leur poursuite en justice et décourager enfin toute velléité de répéter les mêmes méfaits, et donc les mêmes conséquences.
Rien qu’à titre illustratif, il y a lieu de citer : le manque d’enquêtes approfondies sur les allégations de détournements de fonds, notamment de l’ONU, par l’ancien président Joseph Kabila, conformément aux révélations du journal Médiapart ; le manque de suivi soutenu par la société civile dans l’affaire Vital Kamerhé (procès de 100 jours) ; le grand génocide reconnu dans l'histoire et enseigné en Europe reste la disparation de douze millions de Congolais pendant le règne du roi Léopold II. Mais la RDC n’a jamais tenu la Belgique pour responsable ni n’en a demandé les comptes. La dent de Lubumba a été rapatriée au Congo l'année dernière sous forme d'un simple colis DHL. Très âgé, l'un des derniers témoins de l'assassinat du Martyr de l'indépendance congolaise va bientôt tirer sa révérence, mais aucun intérêt de la part du gouvernement congolais n'est à ce jour manifesté pour tenter de l'emmener à dire toutes les vérités sur cette tragédie avant sa disparition.
Par ailleurs, Verbier, le Kingakati de Mobutu en Suisse, n’a fait l’objet d’aucune réclamation pour restitution ni par l’état congolais ou la société civile.
Bien plus, l'affaire Kamina Nsapu, qui fut à l'origine du déplacement de milliers de personnes et de conséquences dramatiques pour la population qui vit encore dans une situation d'extrême pauvreté - sans oublier les milliers de morts résultant de ce conflit - semble être méconnu de la société civile congolaise, comme s'il s'était produit ailleurs, sur un autre continent. Pourtant, le responsable de ce drame est connu et peut continuer à profiter des richesses détournées pour vivre sereinement sa vie malgré plusieurs dossiers sombres qu'il traîne derrière lui! Là encore, la société civile reste motus et bouche cousue
Davantage. Les auteurs du massacre de Yumbi, plus proche de Kwamouth où l'Etat semble perdre, chaque jour qui passe, le contrôle de la situation, déambulent à leur aise dans les rues de Kinshasa et occupent des postes de responsabilité sans que cela ne suscite la moindre mobilisation de la société civile pour que les coupables répondent de leurs actes.
Toutes ces révélations, ainsi que bien d'autres encore de la même veine ou pire, n'ont pas suffisamment indigné la société civile pour les amener à pousser les congolais à descendre dans la rue.
Tout est relégué aux oubliettes de l’histoire
Pourtant, il suffit que des hommes sans âme et sans scrupules comme M. Bitakwira ou M. Onana se mettent à débiter leurs absurdités pour que le phénomène « Mouton de Panurge » soit déclenché sur l'ensemble du territoire national. Autant dire que le crédit est toujours et déjà donné à tout discours de propagande incitant à la haine contre les tutsis.
Comment ne pas dénoncer, dans ce cas, une analogie avec les méthodes utilisées par les nazis pour caractériser les Juifs comme étant une race maléfique dont il fallait à tout prix se débarrasser pour sauver l’Allemagne du péril juif ? C’est pourtant par cette démarche que la Gestapo et les SS de triste mémoire finirent par mettre en service les chambres à gaz.
Comment ne pas assimiler cette rhétorique à celle distillée par la radio Milles Collines et qui avait déclenché le génocide de tutsi rwandais en 1994?
Certes aujourd'hui en RD Congo, un autre débat voit le jour, celui du génocide congolais et aussi des hutus par la soldatesque de l'AFDL et FPR, car souvent on s’emploie intentionnellement à créer et à entretenir la confusion entre l'AFDL et le FPR.
Mais, est-ce que la dénonciation du « prétendu » génocide congolais doit décourager les velléités de ceux qui s’adonnent à faire disparaitre les Tutsis congolais en les poussant vers l'exil et en exterminant ceux qui ne veulent pas être déracinés de leur terre congolaise et de leurs pâturages ?
L'extermination de leur troupeau de vaches, principale source économique des tutsis ne s'inscrit-elle pas dans cette même stratégie de les asphyxier économiquement pour les rendre ainsi misérables, sans ressources et les obliger ainsi à aller grossir les rangs des réfugiés dans les pays avoisinants ?
Pourquoi ne pas mettre en place une politique de stabilisation des communautés congolaises, toutes tendances confondues, afin de favoriser la cohabitation pacifique et une cohésion nationale inclusive dans le respect des valeurs culturelles des uns et des autres, tant qu'elles ne sont pas contraires aux règles morales et d'éthique définies par la déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen ?
Peut-on, en effet, en déduire que sagesse, intelligence et maturité ne sont plus à l'honneur en RD Congo ? La situation est si inquiétante que dès on voit un Congolais qui réfléchit avec sagesse, on doute de ses origines.
Toutes les puissances, la Belgique en premier, profitent de ce manque de conscience collective en DRC. Les Congolais n'ont jamais fait l'effort de penser à leur décolonisation, notamment à travers le fait de se défaire de l'héritage colonial des conflits.
Absence d’une conscience collective
Pendant le Black Lives Matters, des citoyens de nombreux pays du monde ont appelé à la destruction des monuments dédiés au roi Léopold II. Mais très peu de Congolais ont adhéré à ce mouvement. Des Tutsis congolais ont demandé à la Belgique de reconnaître sa responsabilité coloniale dans leur calvaire en RDC. Mais la Belgique a brillé par sa détermination à opposer une fin de non-recevoir à cette requête. Cette démarche ne saurait être couronnée de succès sans être soutenue par le gouvernement congolais.
Les Congolais sont prêts à détruire toute leur économie, à sacrifier tout leur patrimoine pour assurer que les Tutsis congolais ne fassent plus parties de la RDC.
Au demeurant, l’un des défis majeurs auxquels est confrontée la RDC est l’absence d’une conscience collective fondée sur les valeurs fondamentales de respect des droits individuels et des biens publics, la justice, l’honnêteté et l’humanisme. C'est la raison pour laquelle la population est d'office partie prenante aux conflits et à l'instabilité sociale caractérisés par le tribalisme érigé en mode de gestion du pouvoir, ou plutôt en valeurs basiques de la société, entraînant ainsi la perpétuation de la mauvaise gouvernance en RDC.